Les impacts d’un prix-plancher du CO2 dans le secteur électrique
par Christian de Perthuis, Boris Solier, Raphaël Trotignon
Dans l’attente d’une réforme plus profonde du système européen d’échange de quotas de CO2, les pouvoirs publics français envisagent d’introduire en 2017 un prix-plancher de l’ordre de 30 €/tCO2 sur les émissions du secteur électrique. Prise unilatéralement en France, cette mesure pourrait être élargie aux partenaires qui soutiendraient la démarche.
Conduite à partir des modèles ZEPHYR-Elec et ZEPHYR-EU ETS, simulant les équilibres de court terme des marchés de l’électricité et du quota de CO2, cette étude vise à évaluer les impacts d’un tel prix-plancher de 30 €/tCO2, s’appliquant à partir de 2017.
En cas d’introduction unilatérale en France, le prix de l’électricité sur le marché de gros augmenterait de 2,6 à 3,4 €/MWh. L’utilisation des centrales thermiques françaises serait réduite au profit de centrales étrangères, la substitution du charbon par du gaz dans l’offre nationale restant limitée. Il en résulterait une baisse des émissions nationales comprises entre 3,5 et 9,7 MtCO2. A plafond de quotas de CO2 inchangé dans le système européen, le recul des émissions du système électrique français provoquerait un léger affaiblissement du prix du quota et une augmentation des émissions des acteurs non touchés par le prix-plancher qui annulerait le bénéfice environnemental visé.
En cas d’introduction d’un prix-plancher européen, le prix de gros de l’électricité augmenterait d’environ 12 €/MWh. La production thermique nationale, devenue plus compétitive, augmenterait légèrement, limitant la baisse des émissions nationales. Au plan européen, la baisse des émissions pourrait atteindre 124 Mt par an ce qui ferait tomber le prix du quota à zéro. Le système de marché se transformerait en un dispositif de pseudo-taxe générant un bénéfice environnemental net de l’ordre de 50 Mt de CO2 par an sur la période 2017-2020.
Dans les deux cas, pour qu’un prix-plancher appliqué au secteur électrique apporte les bénéfices environnementaux visés, son introduction doit s’accompagner de réformes en profondeur du dispositif européen de tarification du carbone, soit par introduction d’une gestion dynamique de l’offre de quotas CO2, soit par basculement vers un système de taxation.